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L'apensée
2 octobre 2016

Une expo qu’il ne fallait pas rater

Pendant quatre mois, le centre Pompidou a proposé une exposition sur la contre-culture américaine balayant ainsi toutes les œuvres, des fondateurs aux héritiers de la Beat Generation.

Clap de fin le 3 octobre sur l’exposition Beat Generation au centre Georges Pompidou. La contre-culture américaine s’invite à Paris où elle s’est également constituée dans les années 60 dans le Beat hotel. L’exposition s’écoule comme le courant de ce mouvement, de manière désordonnée entre photographies, films, tapuscrits, montages, dessins et musique. Juste en face de l’entrée, tel une rampe de lancement, le rouleau de Kerouac nous met sur la route d’un voyage au plus profond des âmes torturées de Burroughs et Ginsberg. Le fantôme de Neal Cassidy hante les lieux car les femmes qui déambulent dans l’antre de Beaubourg semblent toutes prêtes à succomber à son charme, quand leurs yeux s’accrochent sur les rares photos où il apparaît. Projeté en grand sur un mur blanc immaculé comme les poudres qu’il s’injectait, Bob Dylan tourne les pages de sa chanson avec en arrière plan Ginsberg et Burroughs. Il ne faut pas faire un long voyage en 

stop pour succomber au réalisme des photographies de Robert Frank. D’un noir et blanc cru, les instants décisifs des fondateurs du mouvement Beat se laissent tirer le portrait au quotidien dans leur errance créatrice. Les tapuscrits de Ginsberg « Hurle », leurs poésies sur un mauvais papier trop mince et raturé. On pourrait s’attendre a du psychédélique tant les produits qu’ils ont ingurgités étaient divers, variés et violents mais « il fallait un alcoolique pour avoir la vision claire sur une génération », dit-on de Jack Kerouac. Nous sommes loin des clichés qui associent trop souvent le mouvement Beat aux caricatures de Beatnick. 

En quelques errances, nous passons de Tanger à Mexico, baladés par le regard de Bernard Plossu, ce Frenchy brinquebalé par les vieux briscards. Nul doute que sa rencontre avec la Beat Generation va changer sa façon de photographier et il poursuivra sa carrière en utilisant le matériel le plus simple qui soit, un film noir et blanc et un 50 mm. 

Dans un grand espace sombre, Looking for Mushrooms de Bruce Corner exhibe sans fin des champignons atomiques comme une réthorique des hallucinations des végétaux de même type consommés et dont les visions colorées finissent la projection. 

Le mouvement beat est indissociable du jazz et plus particulièrement du Be Bop de Charly Parker. Mais Bird s’envole et laisse sa place à un style plus électrique à travers des héritiers aussi emprunts à la poésie et aux textes descriptifs comme chez Patti Smith ou Lou Reed. 

Et si finalement cette contre-culture n’était que la véritable culture nord américaine. Avec le mouvement Beat, l’influence culturelle européenne semble 

disparaître. Et pourtant, même les acteurs de la Beat Generation sont influencés par des auteurs du vieux continent comme Arthur Rimbaud et Jean Genet. Chez Kerouac et ses amis, il n’y a jamais eu la volonté de fonder un mouvement. Ils voulaient incarner une liberté d’esprit et de corps dans un pays corseté par des valeurs victoriennes poussant au plus profond du puritanisme. Ils ont eu l’ambition de libérer l’homme de ses entraves en se basant sur la philosophie naturaliste de Thoreau. Cependant, il ne faut pas voir dans cette influence, un retour à la nature si ce n’est, peut-être, la nature humaine. Dans un après guerre où la société tente de se reconstruire dans un monde bipolaire, les géniteurs de la Beat vont voyager.

Il n’est pas surprenant qu’ils furent aussi bien accueillis dans un Paris d’après guerre amoureux de jazz, de rhum, de jolies filles et autour de la machine à rêve.

L’exposition est terminée, il est temps de se replonger dans les écrits écorchés vifs et crus de leur auteurs. Prendre en pleine gueule leur style épuré. Accepter de partager leur vie en quelques lignes pleines de poésie et de violence. Avec les auteurs de la Beat Generation, il faut y consentir :      « take a walk on the wild side. » Ce détour parmi eux ne vous laissera pas intact. Plonger dans l’univers Beat vous poussera à vous remettre en cause, à bousculer votre quotidien et à reconsidérer l’essence même de votre propre existence. La beat vous laissera béat dans des rythmes endiablés de batterie jazz par un Art Blakey rigolard.

 

Laurent Buivosy

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